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L'accès à la profession des entrepreneurs dans le secteur de la construction

L’accès à la profession des entrepreneurs dans le secteur de la construction

En tant qu’entrepreneurs, vous êtes soumis à un ensemble d’obligations légales. Certains secteurs, comme celui de la construction, doivent en outre respecter des exigences spécifiques liées à leurs activités, notamment l’obligation de disposer des accès à la profession.

L’obligation de disposer des accès à la profession est essentielle pour les petites et moyennes entreprises, personne physique ou personne morale, exerçant des activités dans le secteur de la construction.

Comme nous le verrons, le non-respect de cette exigence peut entraîner des conséquences juridiques sérieuses et placer même les entrepreneurs les plus compétents dans des situations délicates.

Afin d’éviter de tels problèmes, examinons d’abord ce que recouvrent exactement ces « accès à la profession ».

A. Concrètement, que vise cet « accès à la profession » ?

La notion d’ « accès à la profession » est fréquemment employée en pratique, bien qu’elle ne fasse l’objet d’aucune définition légale. Cette absence de définition claire, combinée à la dispersion des conditions nécessaires à l’exercice des activités soumises à autorisation au sein de différents textes de loi, contribue à rendre cette matière particulièrement complexe et confuse pour les entrepreneurs.

En réalité, l'accès à la profession est globalement régi par la loi-programme pour la promotion de l'entreprise indépendante du 10 février 1998, qui prévoit en son article 5, §1, :

« Toute PME, personne physique ou personne morale, qui exerce une activité professionnelle pour laquelle la compétence professionnelle est fixée, doit prouver qu'elle dispose de cette compétence professionnelle ».

Sont donc visées par cette loi, les PME répondant aux critères suivants :

  • Le personnel occupé ne dépasse pas une moyenne annuelle de 50 travailleurs ;
  • Un maximum de 25 % des actions ou des parts représentatives du capital social ou des droits de vote y attachés sont en possession d'une ou plusieurs entreprises autres que des PME ;
  • Le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 7 millions, soit le total du bilan annuel n'excède pas 5 millions.

La loi-programme du 10 février 1998 relative à la promotion de l’entreprise indépendante distinguait par ailleurs, d’une part, les connaissances de gestion de base et, d’autre part, les compétences professionnelles, lesquelles constituent les capacités entrepreneuriales visées par le principe d’accès à la profession.

B. Les connaissances de gestion de base

Depuis le 1er octobre 2025, il n'est plus obligatoire, pour l’indépendant qui se lance en Wallonie, de prouver ses connaissances de gestion de base.

La Wallonie était en effet la dernière région qui exigeait encore des entrepreneurs ayant leur siège en Wallonie l’obligation de démontrer des connaissances de gestion de base. Cette suppression était déjà entrée en vigueur en Flandre, depuis 2018, et à Bruxelles, depuis 2024.
Le but de cette suppression est d’encourager et de faciliter l’accès à l’entreprenariat.  

C. Les compétences professionnelles

Attention, l’abolition de l’obligation liée aux connaissances de gestion de base ne met pas fin à l’obligation « d’accès à la profession ». L’obligation de démontrer des compétences professionnelles est toujours d’application.

En matière de construction notamment, l’arrêté royal du 29 janvier 2007 relatif à la capacité professionnelle pour l’exercice des activités indépendantes dans les métiers de la construction et de l’électrotechnique, ainsi que de l’entreprise générale énumère les activités professionnelles concernées par l’obligation de compétence professionnelle.

Selon l’article 3 de cet arrêté « toute personne désireuse d'exercer une des activités professionnelles, visées à l'article 1er, doit prouver disposer de la compétence professionnelle fixée par le présent arrêté ».

Chaque activité nécessite une compétence professionnelle particulière. Il est à noter que, contrairement à ce que certains pensent, l’activité « d’entreprise générale » ne permet pas d’exercer les autres activités réglementées de la construction. Cette compétence permet en réalité uniquement l’emploi de sous-traitants qui disposent des capacités entrepreneuriales nécessaires.

Il n’existe donc pas d’autorisation générale permettant à un entrepreneur d’exercer l’ensemble des activités de construction soumises à réglementation. Il est indispensable d’obtenir, pour chaque type d’activité, les habilitations spécifiques requises.

Vous vous interrogez sur la manière de prouver vos compétences professionnelles ? Plusieurs options s’offrent à vous. Vous pouvez les démontrer au moyen d’un diplôme ou certificat reconnu, qu’il s’agisse d’un diplôme de l’enseignement technique, de promotion sociale, de l’enseignement supérieur, ou encore d’un certificat issu d’une formation professionnelle agréée. Vous pouvez également justifier vos compétences par votre expérience professionnelle acquise au fil des années, sur la base d’attestations d’employeurs, de contrats de travail ou encore de documents sociaux justificatifs.

Il est recommandé de faire publier vos compétences professionnelles à la BCE via votre guichet d’entreprise. Cela permet de rassurer tout maître d’ouvrage qui souhaiterait vérifier vos qualifications, et facilite également la situation si un tribunal devait examiner votre entreprise pour quelque raison que ce soit.

En l’absence de mention de ces compétences à la BCE, la Chambre des Entreprises en Difficulté pourrait être amenée à vous convoquer afin de s’assurer que tout est en règle à ce niveau.

Il convient toutefois de souligner que cette publication n’est pas une obligation pour que vos compétences soient légalement reconnues. L’essentiel est que vous puissiez fournir les justificatifs nécessaires (diplômes, attestations, etc.) en cas de contrôle ou de litige. Cependant, une publication préalable peut contribuer à réduire le risque de contrôles supplémentaires.

D. Quelles conséquences en cas d’absence de compétences professionnelles ?

L’obligation d’accès à la profession est particulièrement importante dès lors qu’il s’agit d’une règle d’ordre public à laquelle il est donc interdit de déroger par des conventions.

Les conséquences de ce caractère d’ordre public sont non-négligeables puisque cela implique que toute convention d’entreprise conclue en violation des obligations liées à l’accès à la profession est nulle.

La jurisprudence est unanime ; ce caractère d’ordre public est nécessaire dès lors que l’objectif de cette règle est « la protection de l’intérêt général qui exige que les constructions présentent des garanties de solidité et d’hygiène nécessaires pour mettre les propriétaires et le public à l’abri de tout risque »[1].

Malheureusement, de nombreux entrepreneurs sont aujourd’hui insuffisamment informés de ces obligations légales, et les dossiers dans lesquels le maître de l’ouvrage invoque la nullité du contrat d’entreprise pour violation des règles relatives à l’accès à la profession se multiplient. Afin d’éviter une telle situation, il est important de respecter les principes essentiels susmentionnés lors de la conclusion de vos contrats d’entreprise. Cela vous permettra de travailler et d’exécuter vos engagements contractuels en toute sérénité.

Nous restons évidemment à votre disposition pour vous accompagner dans le respect de ces formalités, que ce soit à titre préventif ou dans le cadre d’une procédure judiciaire.

 

[1] Liège, 16 juin 1992, J.L.M.B., 1993, p. 1023.

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